Pékoudé : l'esthétique (28/02/2014)


Dvar Torah à la mémoire de notre tante regrettée Mazal tov bat Tamar.

Le mishkan vient compléter la création du monde. Mais il doit résider à Jérusalem.

Le retour à l'art et la beauté exprime la résurrection véritable d'israël après 2000 ans.

Notre parasha aurait pu clôturer toute la Thora. En effet, la fin du livre de Devarim et celle du livre de Shemot sont presqueidentiques. Dans les 2 cas, d'ieu réside au sein du peuple. Dans les 2 cas, le peuple entier en est témoin ("leeyne kol Israël"). La seule différence - capitale - porte sur la cinématique du peuple. Est-il au repos (devarim) ou en mouvement (shemot). Si la Thora juge nécessaire d'insister sur cette distinction physique, c'est qu'il y'a un mode de vie juif "statique" et un judaïsme "en mouvement". Le Rav Tsvi Yehuda Kook associait le livre de Vayikra à la Thora domestique - Torat Habayit - et celui de bamidbar à la torah dynamique - Torat Ha-Derekh. Intéressant il est de constater que chronologiquement, les 2 livres traitent de la même période (mois de Nissan 2449 ou avril-mai 1311 avant EC). Ainsi, la construction du mishkan - lieu de résidence de d'ieu sur terre - représente un avant goût du Beith hamikdash de Jérusalem. A la sortie d'Egypte, il y'a une tentative certaine de compléter l'œuvre du créateur mais celle-ci n'est pas à sa place. Deux livres supplémentaires (Vayikra et Bamidbar) sont par conséquent nécessaires à l'intégration d'un pilier d'israël - le lieu.

Et qui est chargé de la construction de ce lieu si particulier- le mishkan ? Des artistes. Ce ne sont ni des scientifiques, ni des philosophes mais bien des artistes. L'un d'entre eux est Betsalel, grand styliste, espèce d'architecte d'intérieur au goût prononcé pour l'art et l'esthétique. Moise l'a surnommé "Betsel-El" ("dans l'ombre de L'Eternel") car c'est lui qui porte l'intuition de la meilleure manière d'agencer le Mikdash (traité berakhot, 55a). Quel est le sens de cette place soudaine à l'esthétique ? S'agit-il de bâtir un bel édifice au nom de la beauté extérieure ? Ou la Thora aura-t-elle posé l'esthétique comme fondementdu Pays et du temple ? Une réponse originale a été proposée par le Rav Kook lors de l'inauguration de l'académie des Arts à Jérusalem - l'école Betsalel. "Il est magnifique qu'en ces jours-ci (1906), une institution académique israélienne se concentre précisément sur l'art et l'esthétique". Cette déclaration est troublante. En effet, nous sommes, à cette époque, au cœur d'un combat diplomatique sans pareil, les turques occupent encore Eretz Israël et les vagues de juifs d'Europe immigrent dans la douleur. Qu'y a t'il de magnifique ? La preuve que ce retour augure la résurrection véritable d'israël. Car, poursuit le Rav, si on ne s'occupe plus de besoins existentiels mais bien de sujets "auxiliaires" (comme une académie artistique alors qu'il n'y a même pas encore d'universités), c'est le signe que nous sommes revenus à nous mêmes. Sa métaphore imagine une petite fille malade qui lorsqu'elle guérit, ne demandera ni à boire ou à respirer mais exigera, en tout premier lieu, une poupée (lettre 158, Igrot Hareaya).  Une résurrection nationale authentique est accompagnée d'un retour à la culture d'israël. Tradition, entre autres, basée sur la beauté et l'esthétique.

Shabbat Shalom, 

Lionel.