BÉRÉCHITE (Genèse)
CHÉMOT (Éxode)
VAYIKRA (Lévitique)
BAMIDBAR (Nombres)
DÉVARIM (Deutéronome)

 

 

Le prêtre de Midyan

La section de la Thora qui renferme la manifestation de D… au mont Sinaï et la proclamation des Assereth Hadiberoth, des dix paroles de l’Eternel, porte en titre le nom du prêtre idolâtre de Midian, Yithro. L’insigne honneur que la Thora accorde à cet homme est très significatif. Il  indique en premier que la Thora n’est pas le seul apanage du peuple juif. Cette loi universelle s’adresse à toutes les nations et Yithro représente l’exemple par excellence du païen militant qui, après avoir reconnu la futilité des cultes polythéistes dont il fut le grand-prêtre, vient adhérer corps et âme, à la Loi d’Israël. Lors de la fête de Chavouoth qui célèbre l’anniversaire de cet événement grandiose de la théophanie et du don de la Thora au Sinaï, c’est traditionnellement l’histoire de Ruth la Moabite qui est mise à l’honneur, et dont la lecture est réservée à cette occasion . De nouveau, le caractère universaliste de la Thora est mis en évidence. La Mekhilta, texte midrachique sur le livre de l’Exode, rapporte différents avis à propos des événements qui incitèrent Yithro à venir vers le peuple d’Israël. 

Pour Rabbi Yehochoua, ce qui l’aurait décidé, c’est la guerre d’Amalek. Pour rabbi Eliezer, c’est le passage de la mer Rouge. Chacun de ces maîtres soutient que c’est tel ou tel événement qui l’aurait emporté dans la décision finale de Yithro d’embrasser le judaïsme. Pour Rabbi Yehochoua, la guerre d’Amalek l’emporta vu son importance considérable. Celle-ci souligne à ses yeux l’avènement d’Israël sur la scène mondiale, tel le porte-drapeau de la Providence divine, des valeurs permanentes du judaïsme, la justice et la paix, l’amour du prochain et l’espérance pour l’ensemble de l’humanité ; cette confrontation nous offre l’image de Moïse notre maître, qui joue le rôle d’un arbitre qui assiste du haut de la colline à la bataille rangée entre d’un côté les hommes d’élite désignés par Josué parmi les enfants d’Israël, et de l’autre , le peuple amalécite. Les mains levées vers le ciel, qualifié de Emouna en signe d’encouragement et de soutien au peuple afin qu’il demeure ferme dans l’action et la foi pendant la lutte contre les Amalécites. La présence d’Aaron et de Hour aux côtés de Moïse pour l’aider à maintenir ses mains levées vers le ciel, est également très significative. Aaron se distingue par sa bonté et son amour de la paix, alors que Hour est plein de zèle et d’impétuosité. La guerre d’Amalek révèle en outre la volonté affirmée des enfants d’Israël de prendre leur destin en mains, de ne plus se fier uniquement aux miracles de l’Eternel en leur faveur, et de mener de front le combat contre la tyrannie, la haine gratuite et la lâcheté, qui caractérisent Amalek dans son insolence et l’arrogance de prôner l’idéologie du hasard aveugle des événements. La guerre contre Amalek suscite l’admiration de Yithro, parce que désormais les enfants d’Israël font montre de leur aptitude à assumer la mission qui leur est dévolue, d’être un royaume de prêtres et un peuple saint. Pour rabbi Eleazar Ha Modaï, c’est le don de la Thora qui a prévalu par-dessus tout, pour toucher le cœur de Yithro et l’amener à se rallier au peuple juif et à adhérer au mode de vie prescrit par la Thora . Cette constitution  le sublime par le fait qu’elle réclame de l’homme une foi nullement passive, mais plutôt engagée et militante, tant dans le domaine de l’acte, de la parole, que de la pensée de l’homme. Le don de la Thora inscrit le peuple d’Israël dans un projet d’avenir plein de promesse de la réalisation identitaire d’une élévation spirituelle, morale et sociale. Enfin, pour Rabbi Eliezer, ce qui a emporté Yithro et qui l’a subjugué, c’est le miracle du passage de la mer Rouge. Ayant appris cet événement manifeste et grandiose accompli pour la sauvegarde du peuple juif, Yithro réalisa la grandeur de la foi des enfants d’Israël qui se sont lancés dans les flots, pleinement confiants en l’Eternel. L’abnégation dont ils firent preuve a forcé son estime envers le créateur et le peuple qui lui témoigne une telle fidélité . A la réflexion, ces trois Maîtres de la Michna s’entendent pour dire que c’est la guerre d’Amalek qui a pris à cœur Yithro, mais ce qui l’a décidé en définitive, c’est pour l’un le passage de la mer rouge, et pour l’autre, le don de la Thora.  

C’est là le sens de l’expression ‘’vayichma Yithro’’ – il a entendu, dans le sens de comprendre , d’intérioriser les choses, et non une écoute extérieure, telles les nations à l’entour qui, bien qu’ils aient entendu , ne sont pas venus. Comme il est écrit ‘’des peuples apprennent et ils tremblent ; un frisson s’empare des habitants de Philistie’’. Les autres nations se sont contentées des sept lois noakhides et n’ont pas cherché à intégrer le peuple juif, mais Yithro ne s’est pas limité à cela.

 

La convoitise 

 ‘’Ne convoite pas la maison de ton prochain, ne convoite pas la femme de ton prochain, son esclave, ni sa servante, son bœuf  ni son âne, ni rien de ce qui est à ton prochain’’ .

Les dix paroles proclamées au mont Sinaï se clôturent par cet interdit. Ne faut-il pas y attribuer une signification ? 

Après tout, ne reconnaît-on pas que nul enseignement de la Thora n’est anodin et dépourvu de sens !Et de même qu’on justifie la place accordée à :’’Je suis l’Eternel ton D…’’ mis en tête, qualifié de fondement du décalogue et par extension du contenu de la Thora, de même devrions-nous clarifier et comprendre le pourquoi l’interdit de la convoitise est placé en dernier. Cela indiquerait-il l’apogée que nous devrions atteindre ?

En première analyse l’étude comparative de cette parole en regard des neuf précédentes, laisse apparaître que celle-ci ne mériterait pas de figurer parmi elles. En effet, le manquement à cette défense n’entraîne même pas la condamnation à la flagellation du coupable, alors que la violation de chacune des autres conduit à des conséquences graves. Par ailleurs, cette défense se situe à un rang inférieur à d’autres ordonnances qui n’ont pas trouvé place dans le décalogue.

Rachi (1040 – 1105) dit à ce sujet : Tous les 613 commandements sont inclus dans les dix paroles. Il s’inspire du poème religieux composé   pour  la  fête de Chavouoth   par   Rabbenou  Saadia  Gaon

 (882 – 942). Ce dernier considère chacune des dix paroles comme représentant un principe fondamental et les autres prescriptions en découlent. Ainsi donc, la convoitise a par ramifications, de nombreux corollaires.  Et bien qu’il se trouve  parmi elles des infractions  de plus grande gravité, il demeure néanmoins que la défense de la convoitise présente un caractère spécifique, au même titre que celles qui la précèdent. Ce qui lui vaut d’être citée dans le décalogue.

Rabbi Avraham Ibn Ezra (1092 – 1167) s’interroge au sujet de ce commandement. Il se demande : Est-il au pouvoir de l’homme de s’empêcher de convoiter un objet empreint de beauté et de charme ?  En guise de réponse il cite l’exemple d’un simple paysan qui voit passer la princesse royale resplendissante de beauté. Et pourtant il ne la convoite pas, sachant que celle-ci lui reste inaccessible. Il est habitué depuis son enfance à se contenter de sa part et il ne lève pas ses regards vers ce qui est trop élevé pour lui. Il appartient de même à chaque individu de fermer ses yeux et de détourner ses pensées de tout ce que D… lui a défendu.

 Mais comment parvenir à ce stade alors que l’on est naturellement envahi de désirs, avide du fruit défendu,  comme la Thora en témoigne à propos du premier péché de l’humanité ? C’est pour freiner de tels désirs immodérés que la Thora multiplie les mises en garde de ne pas nous laisser aller aux séductions qui nous guettent de toutes parts.

L’être humain doit surmonter ses passions, vaincre ses instincts et dominer ses sentiments, en refoulant ses mauvaises pensées et en canalisant ses élans. C’est à cela que nous invite l’interdit de la convoitise qui tente de nous élever jusqu’au seuil de la sphère idéale où rayonne l’amour d’autrui. C’est là en vérité, le suprême objectif énoncé dans cette parole de la Thora que nous récitons matin et soir dans le Shéma’a : ‘’Ne vous laissez pas séduire par votre cœur et vos yeux qui vous entraînent à l’infidélité…Vous serez saints pour votre D…’’ (Nombres XV – 39), gravée pour tous les temps dans les Tables de la loi ; La défense de la convoitise se présente   sous une double formulation : ‘’ לא תתאוה’’           et ‘לא תחמד          .‘

לא תחמד vise la défense d’un acte affectif qui peut dégénérer en haine et concupiscence et qui envenimerait les relations fraternelles au sein de la communauté humaine. L’enseignement talmudique le traduit par la convoitise d’un objet ou d’une personne pour se l’approprier en se l’octroyant contre paiement, ou par des moyens de pression, de ruse ou de chantage.

‘’ לא תתאוה’’ employé dans la répétition du décalogue dans le livre du Deutéronome, se rapporte au sentiment de la convoitise, purement et simplement, même s’il n’est pas concrétisé par un acte quelconque. Voilà ce qui justifie la place qui lui est conférée au summum de la législation de la Thora d’origine divine. Car seul D… connaît non seulement nos actes, amis aussi nos pensées les plus intimes  et  les  élans  de  notre  cœur.

‘לא תחמד’’ et ‘לא תתאוה’’’’ évoquent par ailleurs le double mot d’ordre du péché originel, comme le stipule le texte : ‘’Lorsque la femme vit que l’arbre était bon comme nourriture et qu’il constituait un plaisir pour les yeux, et que l’arbre était précieux pour la réflexion,…’’(Gen. III – 6).

וַתֵּרֶא     הָֽאִשָּׁה  כִּי  טוֹב הָעֵץ   לְמַֽאֲכָל   וְכִי תַֽאֲוָה־הוּא לָֽעֵינַיִם וְנֶחְמָד הָעֵץ לְהַשְֹכִּיל וַתִּקַּח מִפִּרְיוֹ וַתֹּאכַל וַתִּתֵּן גַּם־לְאִישָׁהּ עִמָּהּ וַיֹּאכַֽל:

 Ce qui caractérise le péché originel, c’est la volonté du premier homme de se mettre dans la situation de la confusion du bien et du mal. Il fait choix de devoir mener le combat contre ses mauvaises pulsions et ne pas bénéficier de ce niveau élevé dans lequel il vit le jour et qui ne nécessitait nul effort de discernement entre le bien et le mal. Il pensait pouvoir surmonter le penchant du mal et le vaincre, même au prix de multiples difficultés, car de la sorte il sortira grandi de l’épreuve et son mérite sera d’autant plus grand. L’orgueil le mena à sa perte.

C’est cette même épreuve que connurent les enfants d’Israël au pied du mont Sinaï. En effet, la proximité de la manifestation divine, de cette révélation grandiose et la proclamation du décalogue, leur permit d’atteindre le niveau le plus élevé du détachement total de toute influence matérielle ; au point que la convoitise est devenue un sentiment qu’ils ignoraient totalement. Comme en témoigne la Thora : ‘’Ah, s’ils pouvaient conserver en tous temps cette disposition à me craindre et à garder tous mes commandements ; alors ils seraient heureux, et leurs enfants à jamais’’ (Deut. V – 26).

 Mais les enfants d’Israël sollicitèrent de l’Eternel de ne pas demeurer dans cet état supérieur. Ils dirent alors à Moïse d’être l’intermédiaire pour leur faire entendre la parole de D…

A l’instar du premier homme, les enfants d’Israël ont fait le choix le plus difficile, celui de mener le combat.

 

Anokhi Ado-naï Elohekha

Les dix paroles sont introduites par les mots ‘’Je suis l’Eternel ton D…’’. Les deux noms divins choisis pour désigner le créateur, indiquent les deux traits de caractère du D… d’Israël. D’une part ‘’Ado-naï’’, Il est l’Etre absolu transcendant le temps et l’espace, qui se suffit à lui-même et qui n’a créé l’univers que par amour des hommes. D’autre part ‘’Elohim’’, Il est le D… personnel, père et juge de tout être humain, maître des destinées des nations et des individus.  Comme le fait remarquer Rabbi Shimon Bar Yohaï dans le Talmud (Berakhoth 7 b), le patriarche Avraham fut le premier à proclamer D… sous le nom de ‘’Adone’’- maître-, ce qui implique que D… n’est pas seulement le créateur de la terre et du ciel, mais qu’Il est le Seigneur de chaque individu, et chaque être humain se trouve dans un état de dépendance personnelle à l’égard de Lui. A cet égard, Malki Tsedek, roi de Chalem, de Jérusalem, identifié à Chem fils de Noé, ayant vécu dans l’arche la catastrophe du déluge, devint l’apôtre du D… suprême, selon l’expression de la Thora ; il ne pouvait douter de l’existence et de la toute puissance du maître absolu de la nature. Aussi, c’est cet attribut qu’il mentionne en premier avant de reconnaître en l’Eternel son action providentielle. Avraham quant à lui, met en avant la glorification du D… personnel, et désigne D… par le nom divin Ado-naï, pour souligner l’attribut de la providence divine dans sa sollicitude personnelle à toutes ses créatures, récompensant ou punissant les individus selon leurs actes. C’est cette conception que le judaïsme a conservée et qui se reflète notamment dans la formule de nos berakhoth, nos bénédictions, établies par nos Sages : ‘’baroukh ata Ado-naï’’ – Toi D… Tu es la source (de la création)- ‘’Elohenou melekh ha olam’’ – notre D… Roi de l’univers- , et où le nom Ado-naï, providence divine, précède ‘’Elohenou’’, le maître de l’univers. Nos Sages enseignent dans le Talmud (Nedarim 32 b) : Malki Tsedek ayant inversé ces attributs de l’Eternel et relégué le principe de la providence divine Ado-naï au second rang après celui d’Elohim le D… suprême auteur des cieux et de la terre, se vit retirer la dignité de la prêtrise, remise aux descendants d’Avraham. Le sujet d’introduction en tête de cette proclamation est le pronom personnel ‘’Anokhi’’ qui désigne l’être dans son existence absolue, dégagée de toute contingence. Le Maharal de Prague  souligne à ce propos la différence de sens avec le pronom ‘’Ani’’ – Je – qui présuppose la présence d’un interlocuteur. Ainsi ‘’Anokhi Ado-naï Elohekha’’ proclame une vérité axiomatique, celle d’un souverain indépendant de sa reconnaissance de la part de ses sujets. C’est pourquoi Rabbi Hasdaï Crescas, philosophe espagnol (1340 – 1410), dans son ouvrage ‘’Or Hachem’’ déclare : C’est une erreur monumentale de considérer la phrase ‘’Anokhi Ado-naï Elohekha’’ comme revêtant la forme d’un commandement et de compter parmi les commandements positifs de la Thora, la foi en l’existence de l’Eternel. Et ce pour différents motifs, parmi lesquels il cite la notion même de la mitzva dans sa définition d’une ordonnance qui ne peut s’appliquer qu’à l’égard d’une volonté exprimée et d’un choix délibéré et librement consenti. Ce qui n’est pas le cas pour la foi en l’existence de D… qui relève d’une tout autre approche. Maïmonide, tant dans son ‘’livre des commandements’’ que dans le ‘’Michné Thora’’, considère ‘’Anokhi’’ comme étant une prescription positive. En effet, dans le ‘’Sefer ha mitzvoth’’, Maïmonide commence ainsi : la première mitzva est le commandemen de croire en D…

Rav Itzhaq Abarbanéel s’oppose à cela dans son ouvrage ‘’Roch Emouna’’. Il s’interroge : comment le premier commandement peut-il être celui de croire en D… ? N’est-ce pas Lui qui a ordonné les commandements ? Aussi, sans la foi en Lui, l’idée de le servir en accomplissant sa volonté n’a pas de place. Par ailleurs, comment peut-on ordonner de croire alors que la foi est un état d’esprit et non un acte dépendant de la volonté individuelle ? Pour répondre à ces questions, certains de nos maîtres nous font remarquer que Maïmonide emploie le mot connaître ‘’yéda – yado’a’’ et non pas croire ‘’léha’amin’’. En d’autres termes, l’homme est en devoir de développer la connaissance et la perception de D… dans son esprit et dans son cœur. Et même si l’on est croyant, on doit s’efforcer d’intérioriser cette foi et de développer une activité intellectuelle nécessaire. Ce processus d’intériorisation est un acte en soi qui peut être exigé de l’individu.  D’autres traducteurs modernes du ‘’Sefer ha mitzvoth’’ abondent dans ce sens et traduisent les paroles du ‘’Sefer  ha mitzvoth’’ par le mot –savoir- qui signifie –comprendre intellectuellement- et non simplement croire.

 

Réflexions

Maïmonide déclare dans le ‘’Guide des égarés’’ (III – 31) : Il y a des gens à qui il répugne de voir un motif d’attribuer quelque raison que ce soit à quelque commandement que ce soit. Ils aiment mieux ne trouver aucun sens rationnel dans les commandements et les interdictions de la Thora. Ce qui les porte à penser cela, c’est une certaine faiblesse qu’ils éprouvent dans leur âme, mais sans laquelle ils ne peuvent raisonner et dont ils ne sauraient bien rendre compte, parce qu’ils pensent que si ces lois avaient leur utilité dans l’existence temporelle et qu’elles nous eussent été données pour telle ou telle raison, ce serait comme si elles provenaient de la réflexion et du discernement d’un quelconque être pensant. Si au contraire, une chose n’a aucun sens compréhensible au niveau de l’intelligence humaine, et qu’elle ne produise aucun avantage, en somme qu’elle n’est d’aucune utilité, c’est sans aucun doute qu’elle émane de la divinité. Car la réflexion humaine ne conduirait pas à une pareille chose. On dirait, conclut Maïmonide, que selon ces esprits faibles, l’homme est plus parfait que son créateur… Or la Thora enseigne : ‘’Ce sera là votre sagesse et votre intelligence aux yeux des peuples, car, lorsqu’ils auront connaissance de toutes ces lois, ils diront : elle ne peut être que sage et intelligente cette grande nation’’ (Deut. IV – 6). Ainsi donc, si les ordonnances de la Thora n’étaient que des décrets divins, sans logique profonde, pourquoi alors, s’interroge Maïmonide, les nations penseraient-elles que les Juifs sont sages et intelligents ? Ce grand philosophe tente dans son ‘’Guide des égarés’’ d’élucider les fondements sociaux et religieux des six cent treize commandements. 

Soulignons par ailleurs que le Midrach (Sifra sur le Lévitique) nous recommande de ne pas dire : ‘’J’ai horreur de la viande de porc’’, mais ‘’J’en mangerais bien, mais que puis-je faire puisque mon Père au ciel a décrété que cela est interdit’’. 

Cette citation nous invite à penser qu’il y a des catégories de lois appelées ‘’houkim’’, des statuts, dont la raison échappe à notre entendement, mais dont la motivation nous est explicitement dictée par la Thora : ‘’Afin que vous soyez saints, car Je suis Saint, dit l’Eternel’’. 

Rabbi Itzhaq disait (Talmud Sanhedrin 21 b) : ‘’Pourquoi les raisons des commandements de la Thora n’ont-elles pas été révélées ? Parce que dans deux cas où ces raisons ont été révélées, un homme de grande valeur a trébuché.’’ L’homme de grande valeur auquel il est fait allusion, c’est le roi Salomon qui, selon la tradition juive, était le plus grand sage de son temps. Néanmoins, bien que la Thora ait recommandé que ‘’le roi n’ait pas beaucoup de femmes de crainte que son cœur ne s’égare’’ (Deut. XVII – 17), le roi Sage s’est dit : ‘’J’en aurai beaucoup sans me laisser égarer’’. Et pourtant, au temps de sa vieillesse, les femmes de Salomon entraînèrent son cœur vers des dieux étrangers (I Rois XI – 4).

Il arrive souvent que la certitude de l’homme sur le sens d’un commandement peut l’amener à ignorer ce commandement en suivant son propre raisonnement. Ainsi, même s’il viole la lettre de la loi, il pense en respecter l’esprit !

 

 

 

Grand Rabbin Chalom Benizri.